Et Sommer arriva

Le gardien de but de la Nati nous parle de prouesses et de la puissance du présent.

Yann Sommer, seit 2018 Markenbotschafter von IWC, trägt die neue Big Pilot’s Watch Perpetual Calendar.

Cette année a été riche en émotions contradictoires. L’été a été plutôt décevant. Froid. Pluvieux. Un été à fuir. Mais nous avons eu un rayon de soleil: Yann Sommer. Le gardien de but de l’équipe nationale suisse. On ne s’en lassait pas, on n’en avait jamais assez et il nous a fait oublier tous nos soucis. Yann Sommer (32 ans) nous a rendus fiers. Euphoriques. À tel point qu’on aurait presque acheté un maillot de foot aux couleurs de la Nati, même en rouge, tant pis. Comme il a défendu! Comme il a sauté! Comme il a tenu! Comme il a su trouver les mots justes dans toutes les situations, jusqu’à ce qu’ils viennent à lui manquer aussi, même à lui, tant il était ému. Et nous, devant l’écran, les yeux humides, pensions: quel homme, ce Yann!

Bolero: Pour commencer, toutes nos félicitations pour ce formidable Euro. Avez-vous vu les mèmes qui circulaient à votre sujet sur Internet après le tournoi? Vous êtes fêté comme celui qui a sauvé l’été ou comparé à un mur de briques.

Yann Sommer: Je n’ai pas recherché les mèmes, mais j’en ai reçu beaucoup. Certains étaient amusants, mais au bout d’un moment, quand il y en a trop, on ne peut plus les voir... (il rit).

De quel moment du tournoi vous souviendrez-vous encore longtemps?

De très nombreux en fait. Mais les huitièmes de finale, pendant lesquels nous avons affronté la France qui menait trois à un, resteront gravés dans ma mémoire. C’est clair, la situation n’était pas favorable, mais c’est justement le moment où l’équipe a fait preuve d’une grande force de caractère et de moral. Nous nous sommes regardés et nous sommes dit: «On y va, on donne tout ce qu’on a.» Notre remontée à trois contre trois et tout ce qui a suivi a été tout simplement incroyable. Ce moment nous a montré à tous ce qu’il est possible de faire quand on refuse de baisser les bras.

Les tirs au but après la prolongation contre la France ont été d’une tension presque insoutenable pour les spectateurs. Ressent-on de la joie en tant que gardien lorsqu’il est clair que le moment est arrivé?

Difficile à dire. Comme nous avons été éliminés plus tôt lors des derniers Euros, la pression était énorme d’arriver en quarts de finale cette fois-ci. Une fois que nous avions rattrapé notre immense écart, j’ai compris que nous devions y arriver, ce serait catastrophique sinon. Mais pour répondre à la question: de la joie? Plutôt du stress.

Comment vous préparez-vous à de telles situations de stress?

Avant le jeu, je regarde les attaquants de plus près avec mon entraîneur et nous réfléchissons à la façon de faire. Depuis plus de dix ans, je travaille également avec un coach mental pour m’entraîner à diverses situations dans lesquelles je suis exposé à une certaine pression: que ressent-on à participer à un tel tournoi? Comment se passent ces matchs à élimination directe, qu’est-ce qui m’attend dans de tels moments et comment dois-je les aborder? Sur quoi dois-je me concentrer? La tension du corps, l’image que l’on renvoie et ainsi de suite. J’utilise tout ça dans les situations de stress.

L’équipe nationale suisse est autant critiquée lors de ses défaites qu’elle est félicitée pour ses victoires. Consultez-vous les médias pendant les tournois?

Ça dépend. Nous avons toujours des journées libres. Il m’arrive alors de jeter un coup d’œil dans le journal et de regarder ce que les journalistes et les gens pensent. Je trouve qu’il est important de réfléchir sur ce qui se passe. Notre équipe a essuyé pas mal de critiques au cours des dernières années – à juste titre dans certains cas, je l’avoue. Bien évidemment, il est agréable de renverser la tendance. Au début de l’Euro, l’ambiance était plutôt tiède, elle a explosé ensuite.

En quoi les éloges et les critiques sont-ils importants pour l’esprit? Car dans le sport plus que dans tout autre domaine, il faut savoir gérer les échecs.

Je travaille aussi sur ces questions avec mon coach mental: comment gérer les critiques, mais aussi les éloges? Dans le cas des critiques, il faut qu’elles soient constructives. Si c’est le cas, je les accepte et réfléchis à ce que j’aurais pu mieux faire. Mais là aussi, il est important d’y mettre un point final et d’aller de l’avant.

Trouvez-vous la presse suisse dure avec vous?

Pas plus que ça. La presse à scandales est ce qu’elle est: lorsqu’on donne quelque chose aux journalistes, ils en tirent profit. En tant que joueurs, nous le savons et nous savons aussi comment en jouer. Il existe malgré tout des situations dans lesquelles on agit sans réfléchir.

Vous êtes considéré comme l’un des joueurs les plus appréciés au sein de la Bundesliga comme dans votre club Borussia Mönchengladbach. Votre pragmatisme, vos déclarations étoffées, votre style sympathique et votre élégance font la différence. Vous êtes pour ainsi dire le Roger Federer du football.

Sincèrement, je suis juste comme je suis. Au début de ma carrière, j’ai décidé que je ne souhaitais pas faire semblant. Bien entendu, on est différent dans la sphère privée et publique, mais j’essaie toujours de rester authentique, d’être ouvert avec les gens et de dire quand je ne suis pas d’accord. Je suis naturellement content de cette image positive qui me poursuit – ou plutôt qui m’accompagne – car elle correspond vraiment à ma personnalité.

Une équipe réunit des mentalités et des égos différents. Comment y trouvez-vous votre place?

C’est une question intéressante. En début de saison notamment, de nouveaux joueurs intègrent une équipe et chacun d’eux a son propre caractère. Je trouve cette phase intéressante. Il s’agit de fonctionner ensemble et de trouver sa place. Avec les années, en tant que joueur expérimenté, on apprend à guider les plus jeunes pour former une équipe soudée. Mais également à assumer ses missions personnelles, qui sont importantes pour l’équipe.

Quand et comment avez-vous réalisé que la force mentale pouvait faire la différence dans votre métier?

Très tôt. La psychologie est très importante au football, notamment pour les gardiens de but: chaque erreur est immédiatement pénalisée. Défendre les buts est une mission passionnante, mais également incroyablement intense. J’ai commencé très tôt à réfléchir aux moyens de devenir plus fort, y compris au niveau mental. Pour être prêt à affronter ce qui arrive.

Vous donnez l’impression d’être aussi ambitieux et discipliné hors du terrain: vous cuisinez, jouez de la guitare, chantez... faites-vous une pause de temps en temps? Regardez-vous Netflix?

Bien sûr! C’est très important. Lire ou regarder la télévision me permet de déconnecter, de décompresser et d’oublier le stress. Cela me montre que je ne dois pas vouloir être le meilleur partout, mais que j’ai le droit de me détendre parfois.

On a l’impression que vous savez parfaitement vivre le moment présent. Pouvez-vous nous donner un conseil pour y parvenir?

J’essaie de ne m’occuper que de moi-même quelques minutes par jour sans devoir planifier ou trop réfléchir. Moi et moi seul, ça me fait beaucoup de bien. Nous vivons tous en pilotage automatique, sommes constamment stressés et faisons beaucoup de choses sans en avoir conscience. C’est là un point essentiel: vivre le moment consciemment permet de mieux le savourer.

Que faites-vous en dehors du sport pour votre équilibre?

J’ai toujours eu de nombreux centres d’intérêt qui n’ont rien à voir avec le football. Le football, c’est super, c’est mon métier, mais un grand nombre de mes amis font autre chose. C’est ainsi que je touche à différents domaines. Je me suis dit: essaie tout ce qui te plaît, ce qui t’intéresse. Depuis, je teste toutes les activités possibles.

C’est peut-être la raison pour laquelle vous êtes très demandé pour représenter des marques. Que vous soyez devant un gril ou construisiez un mouvement chez IWC Schaffhausen, vous semblez authentique.

Ces projets me plaisent beaucoup. Naturellement, avant d’entamer un partenariat, je regarde si je peux m’identifier à la marque. L’équipe et le contenu de la collaboration jouent également un rôle. Les projets que nous réalisons sont-ils intéressants? Ai-je un droit de regard? Cette possibilité d’élargir son propre horizon est très enrichissante.

Tom Brady et Lewis Hamilton sont vos «collègues» chez IWC. Vous êtes tous ambassadeurs de la marque. Que feriez-vous si vous passiez une journée ensemble?

Et bien, je crois que je m’assiérais à une table avec eux pour discuter de nos parcours, de nos carrières respectives. J’aimerais bien savoir ce qu’ils font à côté, mais également comment ils s’entraînent, ce qui compte pour eux, quelle est leur alimentation et ainsi de suite. Il existe tellement de sujets qui m’intéresseraient.

Nous pensions plutôt à une course de karting ou au bungee-jumping... Mais vous préféreriez en fait discuter avec eux.

Nous avons tous suffisamment d’activités au quotidien. Avec d’autres sportifs, je préfère parler de leur vie et de leurs valeurs.

Au sport, nous apprenons beaucoup sur la vie: gérer les succès et les échecs, nous comporter avec les autres, travailler sous pression pour parvenir à son objectif. Quelles sont les qualités qui vous tiennent particulièrement à cœur? Quelles valeurs souhaitez-vous transmettre à vos filles?

Prendre du plaisir à faire ce que l’on fait et mettre toute son énergie dans ses passions. Mais également travailler d’arrache-pied et ne pas se contenter de ses seuls talents. Il faut constamment travailler sur soi, solliciter son corps et ne jamais se reposer sur ses lauriers. Sinon, on a toutes les chances de stagner.

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